" catéchisme de jurons politiques"

" Kolangèt manman [ ...]". C'est l'un des jurons les plus obscènes en créole. Pourtant, le candidat au Sénat, Patrice Dumont l'a lâché sciemment lors d'un interview. Je le critique pas. Je critique pas Martelly qui a flingué une dame de ces propos salaces" M ap fè bagay avè w sou podyòm nan wi" " M tande w bouzen".

Selon le petit Robert, un gros mot est un mot: " qui offense la pudeur, qui est contraire aux bienséances". Partant de ladite définition, on affirmera que les propos susmentionnés offensent la pudeur. Ils sont si salaces qu'un internaute a écrit sur la page de le Nouvel liste que Pépé Dumont n'est pas digne d'être sénateur. Je le comprends. Cependant, l'internaute a erré au plan jurisprudentiel.
Dans le discours politique, un gros remplace joliment une agressivité physique. Pour le dire élégamment, un gros mot permet au locuteur-politicien de verbaliser cette agressivité. Dire un gros mot soulage. C'est ainsi le signe d'une maîtrise de soi. Par l'insulte. Par le juron. Par le gros mot, on abrie sa violence.

Ils sont peu ce qui n'usent pas de gros mots. Comme l'a dit un auteur: " le gros mot est comme un flagrant délit d'humanité". Surtout en démocratie, l'insulte, les gros mots remplacent la violence, la persécution physique et l'exil.

Qu'un Nicolas Sarkozy s'exprime grossièrement" casse-toi, pauv'con", ou Daniel Cohn-Bendit : " ta gueule", ou que l'on dise de Marine Le Pen : réactionnaire confite" et " bigote mal éveillée", c'est de beaucoup plus civilisé que l'usage de la main.

Que chez nous, Youri Latortu qualifie le sénateur Antonio Chéramy, dit Don Kato, de " jeunot" et que le sénateur Jacques Sauveur se sente insulté et demande que le mot soit par Youri enlevé. Que l'honorable Andris Riché traite le sénateur Bien-aimé de " sans caractères et sans scrupules", c'est mieux que l'usage de la baïonnette qui rappelle douloureusement les régimes dictatoriaux.

Je préfère un plat de jurons et d'insultes entre des politiques que la métamorphose des élus du peuples en boxeurs acharnés et le parlement en ring.

Extrait de l'émission Lang pa gen ZO
Animé par: Verly SYLVESTRE, linguiste et juriste

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